Communiqués de presse

du tribunal judiciaire de Paris
30/03/2020 - mise à jour : 24/03/2022
CP

Retrouver ci-dessous les communiqués de presse du tribunal judiciaire de Paris.

Décision de la 1ère Chambre civile relative à la commercialisation par Free des forfaits 5G

L'association FAMILLES RURALES a assigné la SAS FREE MOBILE devant le tribunal judiciaire de Paris afin notamment de l'enjoindre de cesser l'utilisation de l'expression « Forfait free 5G » sans certaines nuances et explications sur l'usage, le débit et les restrictions de ce forfait ainsi que la nécessité de disposer d'un terminal compatible. Elle considère que la commercialisation par la société FREE MOBILE des forfaits « 4G/5G » depuis son site Internet https://www.free.fr comporte des conditions constitutives de pratiques commerciales trompeuses, notamment s'agissant des conditions de l'utilisation du service internet mobile associé à ce type de forfait, les résultats qui peuvent être attendus de l'utilisation de ce service et la portée des engagements de l'annonceur FREE MOBILE.

Par jugement du 22 mars 2022, le tribunal a rejeté les demandes de l'association FAMILLES RURALES.

Le tribunal a jugé que :

  • l'allégation de la société FREE MOBILE relative au débit publiée sur son site internet qui se réfère à la bande des fréquences hautes ne peut être considérée comme trompeuse ;
  • il est incontestable que le trafic du réseau 5G est favorisé par rapport au réseau 4G bien que les ressources allouées à la 5G restent cantonnées à 70 % de la fréquence et même si la 4G n'a pas utilisé la totalité des 30% qui lui sont alloués ;
  • les recommandations aux opérateurs de l'ARCEP en matière de couverture n'ont aucune valeur normative ni contraignante et ne peuvent être opposées en tant que telles à la société FREE MOBILE ;
  • les informations relatives à la couverture 5G et la nécessité de disposer d'un téléphone compatible 5G sont données par la société FREE MOBILE selon des modalités qui permettent à un consommateur normalement attentif d'en prendre connaissance ;
  • l'information selon laquelle l'accès au réseau 5G se fait « sans surcoût » n'est pas trompeuse, en ce sens qu'elle est liée au coût du forfait et non à l'acquisition d'un terminal compatible, étant rappelé qu'il est possible de souscrire un forfait 5G sans nécessairement changer de terminal ce qui conduit alors l'usager à ne pas faire évoluer sa technologie de réception.

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Décisions de la 17ème chambre civile ordonnant le blocage de deux sites internet dont le contenu remet en cause l'existence de l'extermination des juifs par les nazis durant la seconde guerre mondiale.

La 17ème chambre du tribunal statuant en matière civile rend ce jour deux décisions ordonnant le blocage, par les principaux fournisseurs d'accès à internet intervenant sur le territoire national, de l'accès à deux sites distincts dont le contenu remet en cause l'existence de l'extermination des juifs par les nazis durant la seconde guerre mondiale.

La 17ème chambre était saisie par Mme la Procureure de la République près le tribunal judiciaire de Paris, par le biais du pôle national de lutte contre la haine en ligne (PNLH) qui lui est rattaché, a fait assigner les 20 et 22 décembre 2021, selon la procédure accélérée au fond, la 17ème chambre du tribunal statuant en matière civile, sur le fondement des articles 6 I 8, 6 I 7 et 6-3 de la loi du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique (dite loi LCEN), dans leur version issue de la loi du 24 août 2021.

La 17ème chambre du tribunal, par deux décisions rendues ce jour, a fait droit aux demandes du ministère public et a notamment enjoint aux fournisseurs d'accès à internet de mettre en œuvre toutes mesures propres à empêcher l’accès, à partir du territoire français et/ou par leurs abonnés situés sur ce territoire et ce dans un délai maximum de quinze jours suivant la signification des décisions.

Le tribunal a jugé que le contenu desdits sites était notamment susceptible de constituer le délit de contestation de crime contre l'humanité prévu et réprimé par l'article 24 bis de la loi du 29 juillet 1881.

Le tribunal a considéré, au regard du dommage réel et majeur causé par le contenu de ces sites, que le blocage d'accès, qui ne peut être prononcé que si cette mesure paraît, au vu de la gravité du dommage causé par le contenu du service de communication au public en ligne et afin de préserver un juste équilibre avec la liberté d’expression protégée par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, comme adéquate, strictement nécessaire à la cessation du dommage et proportionnée au but légitime ainsi poursuivi, était en l'espèce une mesure adaptée, nécessaire et proportionnée à l’objectif poursuivi, à savoir la cessation de ce dommage d’une particulière gravité.

Le tribunal a par ailleurs précisé qu'afin de veiller à son caractère proportionné, la mesure sera maintenue tant que le dommage perdurera.

Le tribunal a mis le coût des mesures de blocage à la charge des fournisseurs d'accès internet dès lors que malgré leur irresponsabilité de principe au regard des contenus litigieux, ils sont tenus, en application de l’article 6 I 7 de la loi LCEN, de concourir à la lutte contre les infractions prévues par ce texte, dont relève le délit de contestation de crime contre l'humanité. Il a précisé qu'eu égard aux conséquences économiques qui ne sont pas présentées comme excessives par les défenderesses et à l’intérêt majeur qui s’attache à la mesure ordonnée, la mise à la charge de ces dernières du coût de la mesure de blocage n’était pas disproportionnée.

Enfin, en application de l'article 6-3 de la loi LCEN, le tribunal a déterminé les personnes, à savoir les fournisseurs d'accès à internet concernés par les décisions, à qui l'autorité administrative, dans les conditions prévues par ce texte, pourra adresser une demande afin d'empêcher l'accès à tout service de communication au public en ligne qu'elle aura préalablement identifié comme reprenant le contenu des sites litigieux, en totalité ou de manière substantielle, et qui est communément désigné sous le vocable de « site miroir ».

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Décision du PRPC dans le dossier dit de la "Dépakine"

L’association d’aide aux parents d’enfants souffrant du syndrome de l’anti-convulsivant  (APESAC) représente de nombreuses familles dont les mères ont pris un traitement médical pour leur épilepsie comprenant le médicament Dépakine (dont le principe actif est l’acide valproïque ou valproatede sodium) et ses dérivés (Dépakine Chrono, Micropakine, Dépakote et Dépamide), au cours de leur grossesse.

L’association a intenté une action de groupe en droit de la santé publique contre le laboratoire Sanofi-Aventis France par assignation du 2 mai 2017. Ce laboratoire a assigné, à son tour, en intervention forcée l’office national d’indemnisation des victimes d’affections iatrogènes, des infections nosocomiales et des accidents médicaux (ONIAM) ainsi que la société Allianz global corporate & specialty SE.

Par jugement du 5 janvier 2022, le tribunal judiciaire de Paris, après avoir écarté les prétentions relatives à l’irrecevabilité des demandes, la demande tendant à écarter une expertise judiciaire réalisée dans le cadre pénal, la demande sursis à statuer dans l’attente de la décision pénale et une demande de réouverture des débats, a notamment jugé que :

  • la société Sanofi-Avantis France avait commis une faute en manquant à son obligation de vigilance et à son obligation d’information pour les enfants exposés avant le 22 mai 1998 concernant le médicament Dépakine et ses dérivés sur le fondement des articles 1382 ancien et 1240 nouveau du code civil entre 1984 et janvier 2006 pour les malformations congénitales et entre 2001 et janvier 2006 pour les troubles neuro-développementaux. Tout en reconnaissant qu’un consensus scientifique s’était dégagé pour affirmer que ces médicaments sont parmi les meilleurs au monde pour traiter les patients d’épilepsie, le tribunal a relevé que, selon les données de la littérature scientifique, la tératogénicité de l’acide valproïque (c’est-à-dire la possibilité de provoquer des malformations chez les enfants exposés in utero) en ce qui concerne les anomalies de fermeture du tube neural (système nerveux primitif des embryons) pouvait être qualifiée d’association probable à partir de 1984. En ce qui concerne les malformations majeures, cette association pouvait être qualifiée de probable en 1990-1992. Concernant une association possible entre les troubles du comportement et notamment les troubles du spectre de l’autisme et l’exposition prénatale au valproate, une association probable en 2008-2009 est retenue par le tribunal. C’est ainsi qu’il a considéré que le laboratoire aurait dû, dès 1984, solliciter la modification de la notice le médicament Dépakine et ses dérivés auprès de l’agence nationale de sécurité du médicament afin de donner une information claire et précise conforme aux données acquises de la science aux professionnels de santé, aux patients et au grand public, ce qu’il n’a fait qu’en mai 2003 et en ne donnant pas tous les éléments d’information à cette agence, ce qui a conduit cette dernière à rejeter les deux premières demandes considérées comme insuffisamment étayées, avant d’accepter les modifications en janvier 2006 et en avril 2015.
  • la société Sanofi-Avantis France a produit et commercialisé un produit défectueux sur le fondement des article 1386 et 1245 et suivants du code civil pour les enfants exposés  à compter du 22 mai 1998 concernant la Dépakine et ses dérivés entre le 22 mai 1998 et janvier 2006 pour les malformations congénitales et entre 2001 et janvier 2006 pour les troubles neuro-développementaux. Le tribunal a considéré que la présentation du médicament, dans la notice destinée aux patients, ne contenait pas l’information selon laquelle, parmi les effets indésirables possibles du médicament, il existait un risque teratogène d’une particulière gravité, et qu’il existait un risque de troubles développementaux et cognitifs, et ce jusqu’à la demande de modification de la notice de janvier 2006. Il en a déduit que lors de la prise du médicament litigieux, du 22 mai 1998 au 25 janvier 2006 inclus pour les effets teratogènes et de janvier 2001 au 25 janvier 2006 inclus pour les troubles développementaux et cognitifs, le produit ne présentait pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre et que le médicament litigieux était défectueux.

Le tribunal a ensuite fixé les critères d’adhésion au groupe d’usagers du système de santé et a dit que ces usagers pouvaient prétendre à une perte de chance de choisir une alternative thérapeutique moins dangereuse de 95%.

Il a également jugé que les demandes d’adhésion au groupe peuvent être présentées au choix des requérants soit auprès de la société Sanofi-Avantis France soit auprès de l’APESAC, pendant un délai de cinq ans. La juridiction a ainsi ordonné des mesures de publicité extensives du jugement dans de nombreux journaux quotidiens ou hebdomadaires français et a condamné le laboratoire et la société Allianz global corporate & specialty SE à une provision d’un montant de 120 000 euros à valoir sur les frais à venir pour mettre en place la seconde phase d’indemnisation dans le cadre de la procédure d’action de groupe.

Enfin, il a rejeté une demande de consignation de 400 000 euros auprès de la Caisses des dépôts et consignation.

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Décision civile relative au blocage de certains sites Internet

Les associations LA VOIX DE L'ENFANT et E-ENFANCE ont fait assigner les opérateurs internet français afin de leur demander la mise en œuvre de mesures appropriées de blocage pour empêcher l'accès, à partir du territoire français, à neuf sites au contenu pornographique, en se fondant d'une part, sur les dispositions de l'article 6, I, 8 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, d'autre part, sur les dispositions de l'article 835 alinéa 1 du code de procédure civile.

Par décision du 8 octobre 2021, la juridiction des référés a rejeté ces demandes et a condamné les associations aux dépens.

La juridiction des référés a notamment relevé que :

  • pour chaque site internet, les sociétés éditrices sont identifiables et expressément identifiées et que des adresses postales au sein de l'Union Européenne, ou électroniques, permettant un contact direct sont mentionnées par les conditions générales et les politiques de confidentialité desdits sites,
  • les associations demanderesses n'établissent pas avoir tenté de prendre contact avec lesdites sociétés et échouent ainsi à rapporter la preuve qui leur incombe, d'une impossibilité d'agir efficacement ou rapidement contre l'hébergeur ou l'éditeur des neufs sites litigieux, de sorte qu'elles sont irrecevables en leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 6 I 8 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique,
  • par ailleurs, les sociétés éditrices n'ayant pas été attraites à la procédure, et les demandes étant formées à l'encontre des seuls opérateurs internet français sans que le prétendu responsable du trouble soit informé de la procédure, puisse le cas échéant exposer quels sont les intérêts ou droits fondamentaux atteints, présenter ses observations et proposer des solutions alternatives, la juridiction des référés a considéré qu'elle n'était pas en situation de pouvoir exercer le contrôle de proportionnalité des mesures sollicitées, dans le respect du principe de la contradiction, ce qui entraîne le rejet des demandes formées par les associations sur le fondement de l'article 835 alinéa 1 du code de procédure civile.

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Décision des référés à propos de la société Twitter dans le cadre de la lutte contre la haine en ligne

La juridiction des référés du tribunal judiciaire de Paris a été saisie par plusieurs associations, dont l'Union des étudiants juifs de France (UEJF), SOS Racisme, SOS Homophobie et l'association J'accuse (AIPJ) en vue d'ordonner une mesure d'expertise, avant tout procès pour connaître les mesures prises par la société Twitter aux fins de lutter contre la diffusion des infractions d'apologie de crimes contre l'humanité, d'incitations à la haine raciale et à la haine à l'égard de personnes en raison de leur sexe ou de leur orientation sexuelle.

Par ordonnance du 6 juillet 2021, la juridiction des référés a ordonné à la société Twitter international company de produire, dans un délai de deux mois, certains documents relatifs :

  • aux moyens matériels et humains mis en œuvre dans le cadre du service Twitter pour lutter contre la diffusion des infractions d'apologie de crimes contre l'humanité, l'incitation à la haine raciale, à la haine à l'égard de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation ou identité sexuelle, l'incitation à la violence, notamment l'incitation aux violences sexuelles et sexistes, ainsi que des atteintes à la dignité humaine,
  • au nombre, à la localisation, à la nationalité, à la langue et au profil des personnes affectées au traitement des signalements provenant des utilisateurs de la plateforme française de ses services de communication au public en ligne,
  • au nombre d'informations transmises aux autorités publiques compétentes, en particulier au Parquet, en application de l'article 6-1.7 de la loi pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN) au titre de l'apologie des crimes contre l'humanité et de l'incitation à la haine raciale,

sur la période écoulée entre la date de délivrance de l'assignation soit le 18 mai 2020 et celle du prononcé.

La juridiction des référés a notamment considéré que :

  • la demande d'expertise s'analysait, en réalité, en une demande de communication de pièces ;
  • en excipant de la diffusion de nombreux messages antisémites, homophobes et racistes échangés sur twitter avec des demandes de retrait non satisfaites promptement, alors que l'article 6-I.7 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 dite « loi pour la confiance dans l'économie numérique » (LCEN) fait notamment peser sur la société Twitter international company une obligation de concourir à la lutte contre la propagation de tels messages, il est établi la plausibilité d'un procès au fond sur un fondement juridique déterminé à l'encontre de la société Twitter international company ;
  • la mesure doit être regardée comme utile et pertinente dès lors qu'elle a pour objet de permettre aux demanderesses et aux intervenants volontaires de connaître, d'une part, les moyens mis en œuvre par la société Twitter international company pour respecter les obligations mises à sa charge par les dispositions susvisées, et notamment le nombre de personnes physiques chargés d'une mission de modération des propos échangés sur twitter, d'autre part, le nombre de signalements effectués auprès de ses services de messages racistes, homophobes et antisémites et de retraits subséquents.

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Référé probatoire et crise sanitaire

51 demandeurs et 574 intervenants volontaires aux profils divers, s'agissant notamment de personnels médicaux travaillant dans des établissements distincts, de personnes ayant perdu un membre de leur famille suite à une contamination par le SARS CoV-2, d'associations ou de personnes se présentant comme des citoyens ont fait assigner la Ville de Paris, l'ARS, la Direction régionale de la Santé, la Haute Autorité de la Santé, l'Agence nationale de Santé Publique, la Direction des douanes et des droits indirects, des supermarchés et groupements d'achats de ces supermarchés ainsi que des EHPAD et des diverses associations notamment devant la juridiction des référés du tribunal judiciaire de Paris aux fins d'obtenir la production de très nombreux documents liés à la crise sanitaire (fonctionnement des EPHAD pendant cette période, gestions des stocks de masques et d'équipements individuels de protection, évolution des budgets, des personnels de santé, des appareils médicaux, comptes rendus de fonctionnement pendant la crise et stratégie mise en place, notamment).

Par décision du 9 juin 2021, la juridiction des référés a rejeté l'ensemble de ces prétentions et a condamné les demandeurs aux dépens.

La juridiction des référés a notamment relevé que :

  • l'action est initiée essentiellement en vue de satisfaire à ce que les demandeurs décrivent comme leur « droit de savoir », et d'obtenir des informations sur la crise sanitaire liée au coronavirus, sans pour autant qu'ils se positionnent clairement sur la nature de l'action envisagée au fond en lien avec les informations demandées ;
  • le nombre et l'hétérogénéité de la situation juridique des demandeurs mais aussi des défendeurs dont certains sans aucun lien contractuel ou délictuel, l'énumération pléthorique des fondements juridiques développés, la diversité de l'objet des demandes de communication de pièces ne permettent pas à la juridiction des référés de caractériser, pour chacun des demandeurs, un litige potentiel futur dont la solution pourrait dépendre des mesures sollicitées ;
  • l'utilité et la pertinence de certaines demandes de communication de documents font défaut, ces documents ayant été rendus publics ou étant accessibles ;
  • diverses commissions ont déjà commencé une analyse de l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus covid-19 et procédé à l'évaluation des politiques publiques face aux grandes pandémies à la lumière de la crise sanitaire de la covid-19 et de sa gestion, outre plusieurs procédures pénales également en cours.

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Compétence du juge d’appui en matière d’arbitrage : décision du tribunal judiciaire de Paris

La Chambre de Commerce Internationale (CCI) a été saisie d'une demande d'arbitrage dirigée contre onze défendeurs.

Contestant la décision prise par la Cour internationale d'arbitrage d'exclure neuf de ces onze défendeurs de la procédure d'arbitrage et reprochant à l'arbitre désigné par les deux défendeurs admis d'avoir manqué à son obligation de révélation, les demandeurs à l'arbitrage ont saisi le président du tribunal judiciaire de Paris, en sa qualité de juge d'appui, selon la procédure accélérée au fond.

Le juge d'appui a décidé :

  • d'une part, que la demande tendant à voir étendre la procédure d’arbitrage à tous les défendeurs visés par la demande d’arbitrage ne relevait pas de la compétence du juge d'appui, les décisions d'exclusion prises par la Cour internationale d'arbitrage en application des stipulations du règlement d'arbitrage de la CCI, auquel les signataires de la clause d’arbitrage ont entendu se soumettre, ne pouvant caractériser ni une carence du centre d’arbitrage, ni un déni de justice ;
  • d'autre part, que la demande indemnitaire dirigée contre l'arbitre désigné par les défendeurs admis, qui avait finalement retiré sa candidature, relevait de la compétence des juridictions de droit commun.

Cette décision vient confirmer qu'en matière d'arbitrage institutionnel, la compétence du juge d'appui est subsidiaire.

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Décision sur la compétence en matière de responsabilité de l'arbitre

Le tribunal judiciaire de Paris s'est prononcé, le 31 mars 2021, sur la question de la compétence de la juridiction susceptible de connaître d'une action en responsabilité d'un arbitre.

Deux sociétés de droit étranger ont conclu deux accords relatifs notamment à la distribution de pièces détachées et de véhicules. Ces accords étaient soumis à des clauses compromissoires prévoyant un arbitrage à Paris sous l'égide de la Chambre de commerce internationale, avec application du droit allemand.

Une sentence arbitrale a été rendue à la suite d'un différend relatif au non renouvellement de ces deux accords.

La sentence a été annulée par la Cour d'appel de Paris qui a estimé qu'un des arbitres n'avait pas satisfait à son obligation de révélation des liens unissant le cabinet d'avocats pour lequel il travaillait à une des parties à l'arbitrage.

C'est dans ce contexte que la responsabilité de cet arbitre a été recherchée devant la juridiction parisienne.

Le tribunal judiciaire de Paris a jugé que :
1°) l'action en responsabilité de l'arbitre fondée sur la mauvaise exécution des engagements souscrits dans le cadre du contrat d'arbitre, ayant un objet distinct de l'arbitrage, ne relève pas de l'exclusion (de l'arbitrage) prévue à l'article 1er, paragraphe 2 sous d) du Règlement (CE) n°1215/2012 du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (Bruxelles I bis) ;
2°) la juridiction compétente pour connaître de cette action est, conformément à l'article 7 paragraphe 1 sous b) de ce Règlement, tel qu'interprété par la Cour de justice de l'Union européenne, celle du lieu où l'arbitre a effectivement et de manière prépondérante déployé son activité d'arbitre.

Le tribunal a considéré dans un premier temps que les mentions du contrat suivant lesquelles "le lieu de l'arbitrage est Paris" et les "sentence et ordonnances de procédure du tribunal arbitral sont réputées avoir été rendues au lieu de l'arbitrage à savoir à Paris", dont l'objet est de déterminer la juridiction compétente pour connaître d'un éventuel recours en annulation, ne pouvaient être ici considérées comme établissant la commune intention des parties de faire de ce lieu, celui du lieu d'exécution effective de la prestation d'arbitre, avec toutes les conséquences qui en découlent, ce d'autant moins que les parties avaient au cas particulier expressément convenu que les audiences se dérouleraient en Allemagne, où avaient également eu lieu toutes les délibérations.

Puis dans un second temps, après avoir recherché concrètement les éléments permettant de caractériser le lieu d'exécution effective de la prestation intellectuelle de l'arbitre, le tribunal a considéré que celui-ci était situé en Allemagne et s'est donc déclaré incompétent pour connaître de l'action en responsabilité de l'arbitre dont il avait été saisi.

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Ordonnance de référé relative au blocage d'un site hébergeant des données médicales illégalement collectées

Un fichier contenant 491 840 lignes de données personnelles et médicales de patients illégalement collectées et rassemblées a été mis en ligne sur internet.

Chaque ligne se rapporte à une personne physique identifiée par son nom, son prénom, sa date de naissance, son numéro de téléphone fixe et/ou portable, son numéro de sécurité sociale, son adresse postale et son adresse électronique. Ces informations sont complétées par d’autres données, comme le nom et les coordonnées du médecin traitant, la date de la dernière visite médicale, le nom de l’assuré social dont le patient est ayant-droit.

Des données médicales sont également renseignées, comme le groupe sanguin, le facteur rhésus et l’existence ou non d’une affection de longue durée. Un champ nommé « commentaires » contient des indications libres qui peuvent renvoyer, à nouveau, à d’autres données à caractère personnel (numéro de mutuelle, par exemple).

Plusieurs de ces champs contiennent des indications relatives à l’état de santé des patients.

Saisi par la voie d’une procédure de référé à l’initiative de la président de la Commission informatique et libertés (CNIL), le tribunal judiciaire de Paris a ordonné aux quatre fournisseurs internet français (Orange, SFR, Bouygues et Free) de mettre en œuvre sans délai le blocage du site internet où est hébergé le fichier litigieux.

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Décision civile à propos de l’exception d’inexécution en matière de loyers commerciaux pendant la période de crise sanitaire

La 18ème chambre civile du tribunal judiciaire de Paris, compétente en matière de propriété commerciale, a rendu le 25 février 2021 un jugement dans un litige opposant un bailleur à un preneur sur le renouvellement d’un bail commercial portant sur un local situé à Paris, loué pour une activité de vente d’objets d’art et de décoration.

Parmi les prétentions soumises à la juridiction, le preneur opposait au bailleur l’exception d’inexécution prévue par les dispositions de l’article 1219 du code civil, du fait de la fermeture imposée de son local du 15 mars au 11 mai 2020, pour réclamer la restitution de loyers versés au bailleur pour cette période.

Le tribunal a jugé, en application des dispositions de l'article 1719 du code civil, que les obligations de délivrance du bailleur d’un local conforme à la destination contractuelle, dans lequel il est en mesure d’exercer l’activité prévue par le bail, et d’en faire jouir paisiblement celui-ci pendant la durée du bail, n’ont pas pour effet d’obliger le bailleur à garantir au preneur la chalandise des lieux loués et la stabilité du cadre normatif, dans lequel s’exerce son activité.

Constatant que le preneur ne discutait pas le fait que son local lui permettait d’exercer l’activité prévue au bail, et que le bailleur n’était pas garant du trouble de jouissance résultant de la fermeture administrative de son commerce imposée par les mesures législatives et réglementaires de lutte contre la propagation de l’épidémie liée au SARS-CoV-2, le tribunal a rejeté la demande en restitution des loyers payés.

>> Consulter la décision de la 18ème chambre du TJ de Paris (du 25 février 2021)

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Décision de référé sur les pertes d'exploitation de restaurateurs assurées pendant la période Covid

Trois sociétés exploitant des restaurants à Paris ont fait assigner leur assureur, la société Caisse régionale d'assurances mutuelles Rhône-Alpes Auvergne (ci-après « Groupama »), devant la juridiction des référés du tribunal judiciaire de Paris pour demander la prise en charge, par provision, de leurs pertes d'exploitation aux termes de polices d'assurance, rédigées en des termes identiques, qui prennent en compte la « fermeture de l'établissement sur l'ordre des autorités administratives lorsqu'elle est motivée par la seule survenance effective des événement suivants : (...) de maladie contagieuse et d'épidémie ».

La juridiction retient que ces dispositions supposent à l'évidence et sans qu'il soit besoin de les interpréter, l'indemnisation des pertes d'exploitation générées par les confinements décidés par les autorités sanitaires ainsi que celles générées par la fermeture administrative des restaurants dans les limites des stipulations contractuelles.

Elle a ainsi octroyé une provision pour la période du 15 mars au 22 juin 2020, en se fondant sur la méthode figurant au contrat et sur le taux de marge brut proposé par les restaurateurs, tout en déduisant les économies réalisées grâce aux mesures de chômage partiel.

Cependant, elle a considéré, pour la période du 23 juin au 30 août 2020, que la notion de « fermeture » nécessitait une interprétation excédant les pouvoirs du juge des référés, de sorte que la provision pour ces deux périodes a été rejetée.

Par ailleurs, a également condamné l'assureur à une provision de 15 000 euros sur le fondement de la résistance abusive pour avoir refusé tout versement d'indemnité provisionnelle à un restaurateur retenant sa mauvaise foi lorsqu'il exige préalablement des justificatifs des ventes à emporter réalisées pendant le premier confinement pour retenir tout paiement.

Enfin, elle a ordonné une expertise judiciaire pour déterminer les pertes d'exploitation sur une période de douze mois à compter du 15 mars 2020.

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Décision du pôle social dans le dossier Suez/Veolia

La société VEOLIA ENVIRONNEMENT a diffusé par voie de presse le 30 août 2020 une offre d'acquisition de 29,9 % (sur 32 %) des parts que la société ENGIE détient dans le capital de la société SUEZ « (...) en vue de créer un grand champion mondial Français de la transformation écologique. (...) ». Elle a par ailleurs précisé que cette offre constituait la première étape d'un processus devant être suivi d'une seconde étape visant à déposer une Offre publique d'acquisition (OPA) volontaire du solde de SUEZ dans un délai de 12 à 18 mois.

Cette information a donné lieu, à l'initiative du Comité social et économique (CSE) de l'Unité économique et sociale (UES) SUEZ et de deux autres CSE d'établissement de SUEZ, à l'engagement et au soutien d'une première procédure de référé par assignation du 22 septembre 2020 devant le pôle social du tribunal judiciaire de Paris.

Suivant une ordonnance de référé rendue le 9 octobre 2020, le pôle social du tribunal judiciaire de Paris a notamment ordonné « (...) la suspension de l'opération résultant de l'offre d'acquisition par VEOLIA des actions de SUEZ détenues par ENGIE et l'OPA de VEOLIA sur SUEZ, tant que les CSE concernés n'auront pas été informés et consultés sur les décisions déjà prises et annoncées publiquement par voie de presse le 30 août 2020 par VEOLIA et ENGIE ».

Suivant un arrêt rendu le 19 novembre 2020, la cour d'appel de Paris a notamment confirmé en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé précitée du 9 octobre 2020.

Arguant de circonstances nouvelles susceptibles d'entraîner la rétractation ou la modification de l'arrêt précité du 19 novembre 2020 de la cour d'appel de Paris, la société VEOLIA ENVIRONNEMENT a de nouveau saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Paris en procédure de référé ,au visa de l'article 488 du code de procédure civile, par assignation du 15 décembre 2020, afin notamment de remettre ou mettre en débat « la suspension de l'opération résultant de l'offre d'acquisition par Veolia des actions de Suez détenue par Engie et l'OPA de Veolia sur Suez » ainsi que « la suspension des effets de la cession des actions détenues par la société Engie au sein des sociétés SA Suez, SAS Suez Groupe, SA Suez Eau France et du groupe Suez au bénéfice de la société Veolia » devant selon elle prendre fin le 5 février 2021.

Par ordonnance du 15 janvier 2021, la juridiction des référés du tribunal judiciaire de Paris, en application des dispositions de l'article 488 du code de procédure civile, a considéré que de telles demandes de rétractation de la précédente procédure de référé entièrement confirmée en appel relevait de la seule compétence d'attribution de la cour d'appel de Paris et a décliné en conséquence sa compétence sur l'ensemble des demandes de la société VEOLIA ENVIRONNEMENT.

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Jugement civil à propos d'une cagnotte Leetchi

Le  6  janvier  2019,  M.  Nicolas  Alves  a  créé  sur  le  site  Internet Leetchi.com une cagnotte Leetchi, dite solidaire de type entraide, avec comme intitulé « Soutient un boxeur gilet jaune ».

Par jugement du 6 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Paris a prononcé la nullité du contrat conclu entre la société Leetchi et M. Nicolas Alves et a ordonné à la société Leetchi de restituer à l’ensemble des participants la cagnotte des fonds collectés en vertu du contrat annulé.

Le tribunal a considéré, au visa de l’article 1162 du code civil, que :

  • au moment de l’ouverture de la cagnotte, la seule notoriété du « boxeur gilet jaune » reposait sur le fait d’avoir commis des violences sur les forces de l’ordre et, plus précisément d’avoir assené des coups de poing à un gendarme mobile et des coups de pied à un autre gendarme à terre ; ainsi, la cagnotte a eu, initialement, pour but de soutenir un combat consistant en l’usage de la violence physique contre les forces de l’ordre ;
     
  • par son large objet, la cagnotte comprenait également un appel à compenser les condamnations susceptibles d’intervenir à l’avenir, ce qui est contraire à l’ordre public.

Enfin, le tribunal a rejeté intégralement les prétentions des demandeurs tendant à la condamnation, par la société Leetchi, à leur payer les sommes suivantes : 145 152,46 euros au titre des fonds récoltés, 10 000 euros au titre de la résistance abusive et 2 032 128 euros à titre de dommages-intérêts en raison de la perte de chance alléguée liée à la fermeture anticipée de la cagnotte. Ces mêmes demandeurs ont été condamnés aux dépens.

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Communiqué sur une décision civile rendue par le tribunal judiciaire de Paris

Par décision du 4 janvier 2021, la juridiction des référés du tribunal judiciaire de Paris a ordonné l’expulsion d’occupants sans droit ni titre du restaurant « Le Petit Cambodge » situé dans le 10ème arrondissement de Paris. Ces occupants, qui se décrivent comme un collectif de militants regroupé au sein d’une association « Le H Sainte Marthe », revendiquaient une « action politique » en occupant le restaurant depuis le mois de novembre 2021.

La juridiction des référés a rappelé que cette occupation illégitime constitue en soi un trouble manifestement illicite au sens de l’article 835 du code de procédure civile, en ce qu’elle porte atteinte au droit de propriété, principe fondamental de valeur constitutionnelle protégé par l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, sans nécessité impérieuse tenant à la préservation d’un autre droit essentiel, ni légitimation à raison de la destination commerciale des lieux investis. Cette dépossession subie par la société « Le Petit Cambodge » affecte aussi, selon la juridiction, incontestablement sa liberté d’entreprendre, autre principe fondamental de valeur constitutionnelle reposant cette fois sur l’article 4 de la Déclaration des droits de l'homme, dont il importe que soit préservée l’effectivité.

Les délais d’expulsion sollicités n’ont pas été octroyés.

La juridiction des référés a condamné un défendeur personne physique et l’association « Le H Sainte Marthe » à régler à la société « Le Petit Cambodge » une somme de 153 euros par jour à titre d’indemnité d’occupation jusqu’à la libération des locaux, outre une somme de 4 000 euros au titre des frais de procédure.

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Prise de date : message important

Un communiqué relatif à la réforme de la prise de date pour les avocats.

>> Lire le communiqué de presse sur la prise de date (du 28 octobre 2020)
 

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L'exigibilité des loyers commerciaux pendant la période Covid-19

Un communiqué et une décision du tribunal judiciaire de Paris sur la question de l'exigibilité des loyers commerciaux pendant la période Covid-19.

>> Lire le communiqué de presse (du 15 juillet 2020)

>> Consulter la décision de la 18ème chambre du TJ de Paris (du 10 juillet 2020)
 

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La lutte contre les violences conjugales et les violences intra-familiales

Le confinement  peut exacerber les tensions et les violences au sein du foyer et exposer les femmes et les enfants à un danger accru pour leur intégrité physique et morale.

C’est pourquoi, la Maire de Paris, le Préfet de police, le Préfet de Région, le Président et le Procureur de la République du Tribunal judiciaire de Paris ont rappelé dans un communiqué commun (ci-dessous) que même en cette période de confinement, la lutte contre les violences conjugales et les violences intra-familiales est une priorité.

Les services de police, justice et de la Ville de Paris sont mobilisés et toute personne victime de violence peut déroger aux règles du confinement pour sa sécurité, celle de ses enfants.

>> Lire le communiqué de presse (du 28 mars 2020)


L’Observatoire parisien des violences faites aux femmes (OPVF) a réalisé une fiche ressource (ci-dessous), qui dresse un état des lieux du réseau institutionnel et associatif spécialisé. Vous y trouverez les actions de chacune des structures partenaires, après réorganisation de leurs activités du fait du confinement.

>> Violences faites aux femmes en situation de confinement COVID-19
Les ressources disponibles


Pour plus d'informations utiles: site Internet Mairie de Paris
Consulter l'affiche sur les violences conjugales et intra-familiales (Ville de Paris)